Sémion KIRSANOV
(1906-1972)
La maison vide
O maison vide
la peur vient vite
les portes jettent
des cris de bêtes
maussade et seule
la table au sol
suit la rencontre
des ombres-monstres…
Vide maison
à double fond
désert où errent
souvenirs d’hier :
l’amour, des voix
bougies, émois
bancs murs où fondent
nos vieilles ombres !
rires d’alors
cris de douleur
sont-ils cachés
sous le plancher ?
O maison vide
où rien ne vibre
où il ne reste
personne, ou presque :
mots creux et vils
regards sans vie
nous – le cœur vide
Simplement
Simple rugissement
simple rumeur du sable
tu es tout simplement
l’amour ineffaçable.
Simplement la clarté
que je cherchais sur terre
sainte simplicité
du ressac sur les pierres
Tu es venue toi-même
sans rien qui sonne faux
simplicité suprême
de la terre et de l’eau
Tu vins tout simplement
et le sable garda
d’un lion les pas brûlants
incrustés de mica
Simple rugissement
silence des rochers
tu es tout simplement
l’amour que je cherchais
***
Une fille marchait. Et pleurait.
Elle essuyait ses yeux, abattue.
Moi je sais bien qui elle a perdu.
Passants, pourquoi avec des yeux secs
Vous faufilez-vous sans la voir même ?
Jamais perdu un être qu’on aime ?
Ou bien cachez-vous toutes vos larmes
Comme les bouleaux, en plein hiver,
Cachent sous leur écorce une sève amère ?
Traduction © Henri Abril. Tous droits réservés