Les Papouètes

 

Les Papouètes

suivi de Lettres à Bêtes

Poèmes pour les enfants
moins petits que grands
aussi noirs que blancs
ni trop bêtes ni trop méchants

 

Illustré par Christine Zeytounian-Beloüs

 

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Extraits

Le poète

Si je n’étais pas poète,
Je serais peintre, bien sûr.
Je prendrais pinceaux, palette,
Pour repeindre la nature :
Verts le ciel, les alouettes,
Bleus les bois et la verdure.

Si je n’étais pas poète,
Je serais un musicien.
Je jouerais de l’espinguette
Pour amadouer le destin ;
Tous les jours ce serait fête
Pour vous et moi aussi bien.

Si je n’étais pas poète,
Je serais un philosophe.
Les mots, les pensées inquiètes,
Je les mettrais dans mon coffre,
En me nourrissant de blettes,
Vêtu d’un lambeau d’étoffe.

Si je n’étais pas poète,
Je serais marchand d’azur,
Réparateur de girouettes
Ou goûteur de confitures…

Mais voilà, je suis poète,
Et la vie est dure, dure.

*
Un proverbe :
Qui sème le vent récolte la tempête

J’avais semé une brise,
Et j’ai récolté la bise.
J’avais semé trois autans,
J’en ai récolté autant.
J’ai semé la tramontane
Et vu pousser des pets d’âne.

J’ai planté un sirocco :
Pour tout fruit, des quiproquos.
Puis j’ai semé un blizzard –
Ma moisson : un vent bizarre.
Sitôt semée, la tempête
Prit la poudre d’escampette !

Qui sème le vent
Ne récolte que du vent.
Qui trop s’aime
Ne récolte que soi-même.

 

Le métier

Le laboureur veut qu’un soc
Fende le corps de la terre.

Le mineur creuse le roc,
Toujours plus près de l’enfer.

Le poète fend l’époque
Et creuse dans la lumière.

*

Entre le soleil et nous
Le maçon plâtre les murs.

Le menuisier colle et cloue
Les planches et les blessures.

Le poète défait tout,
Déplâtre et décloue l’azur.

*

Le mitron pétrit l’écho
Et y ajoute une fève.

Le couturier coud la peau
D’Adam et de sa chère Ève.

Le poète coud les mots,
Pétrit la vie et le rêve.

 

Le coq-à-l’âne

Le coq
un jour dit à l’âne :
Mes œufs blancs dont tu te moques
sont meilleurs que ton avoine.

Au coq
il répondit l’âne :
C’est vrai, dans une autre époque
je portais enfants et moines.

À l’âne
répondit le coq :
Pendant que je me pavane,
toi tu fais le ventriloque.

Et l’âne
dit alors au coq :
Bah, ni moi ni ma sœur Anne
n’aimons les œufs à la coque !

 

La guerre

Il dit, le capitaine :
— Donnez-moi une épée
pour défendre la reine.

Il n’y a plus d’épées,
plus de rois, plus de reines.

Il dit, le capitaine :
— Donnez-moi un fusil
pour défendre nos plaines.

Hélas, plus de fusils,
et plus la moindre plaine.

Il dit, le capitaine :
— Donnez-moi une bombe
pour la guerre prochaine.

Il n’y a plus de bombes,
plus de guerres et même
plus de traces humaines.
Plus rien que le fantôme
du dernier capitaine.